samedi 14 mai 2016

Le concept de Responsabilité Sociale des Entreprises


Responsabilité Sociale des Entreprises
La responsabilité sociale des entreprises (RSE) suscite autant d’intérêt que de controverses. En effet, on assiste depuis quelques années à une floraison de discours, de rapports et de livres sur le développement durable dans les entreprises ou sur la responsabilité sociale des entreprises (corporate social responsability en anglais). Ce mouvement témoigne de l’importance croissante pour les entreprises t’intégrer le champ social et environnemental comme facteur de production. Il est indéniable que leur responsabilité première est de générer de la valeur ajoutée, mais elles peuvent également contribuer à la réalisation des Objectifs de Développement Durable (ODD) sociaux et à la protection de l’environnement, au-delà des seuls objectifs traditionnellement connus ou des prescriptions et incitations publiques, en intégrant la responsabilité sociale comme véritable investissement stratégique. Pour l’Afrique, continent en quête de développement et de croissance soutenue, la RSE représente une opportunité : celle de soutenir un développement durable et inclusif tout en améliorant la performance et l’image des entreprises. Seulement, il faut avant d’approfondir l’intérêt réservé par la RSE aux entreprises et donc à l’économie, comprendre le concept, ses origines et sa méthodologie.


1.    Qu’est-ce que la Responsabilité Sociale des Entreprises ?

Concept encore moins développé en Afrique, la RSE désigne selon une définition convergente des Nations unies, de l’OCDE, de la Commission européenne et de l’Organisation internationale ISO, la contribution des entreprises aux enjeux du développement durable et leur responsabilité vis-à-vis des impacts environnementaux et sociaux de leurs activités. Notons qu’il n’existe pas de définition consensuelle et internationalement retenue en tant que tel, mais les caractéristiques qui la sous-tendent[1]. La RSE pourrait essentiellement signifier le souci d’amélioration par les entreprises –et ceci de leur propre grès- des intérêts sociaux et environnementaux en liaisons avec les parties prenants dans le but de préserver la génération présente des défis liés aux changements climatiques et de promouvoir un meilleur cadre de vie pour la génération future. Elle intégrée la gestion des relations avec les clients, fournisseurs et la société civile, la lutte contre les discriminations au lieu du service, la prise en compte de l’hygiène et la sécurité dans son volet social. Au niveau environnemental, elle lutte contre les pollutions, les changements climatiques et la dégradation de l’environnement. Deux notions clés se dégagent de cette définition :

  •     « Acte volontaire » pour caractériser le dépassement du simple respect de la règlementation ou celui de la recherche du profit ;
  •     « Intérêts sociaux et environnementaux » afin de prendre en compte les externalités négatives liées aux activités des entreprises sur l’environnement et en rapport avec le social.
La prise de conscience d’un certain nombre d’entreprise en Afrique de leur responsabilité sociale trouve ses origines dans l’observation du système moderne de production des pays du Nord et des conséquences y relatives. Seulement, très peu d’entreprises s’y engagent vraiment. La méconnaissance des bénéfices de la RSE auprès de celles-ci peuvent expliquer la timidité des entreprises à réellement s’engager dans le développement durable de leur activité.

2.    Pourquoi les entreprises doivent s’engager dans la RSE 

Nous l’avons fort rappelé, l’entreprise est un vecteur incontournable pour le développement d’une économie. Seulement, les conséquences liées à son activité ne rendent pas compte d’une gestion équitable du sociale et durable de l’environnement. La RSE se veut donc une mesure correctrice et moralisante. Elle serait même un indicateur de performance de ces entités. Cependant, plusieurs études ne s’accordent pas à ce dernier sujet. Pourtant certaines entreprises s’engagent parfois de leur propre initiative ou dans le but de suivre le protocole de Kyoto. Toutefois, de manière concrète, pourquoi une entreprise devrait s’engager à la RSE ?

a) Préservation de l’image et accroissement de la notoriété auprès des consommateurs 

L’image de marque d’une entreprise de même que sa notoriété auprès de sa clientèle sont des éléments très importants pour un manager. Etant donné la qualité et la quantité des productions dictées par la demande sur le marché, les dirigeants doivent intégrer en tout temps les besoins des consommateurs pour leur apporter satisfaction et assurer une rentabilité.
Dans un contexte de crise de confiance, les attentes des parties prenantes (ONG, consommateurs, …) en matière de gouvernance, d’hygiène, de protection de l’environnement ou de respect d’équité sont légions. L’entreprise ne pourra y apporter de remèdes qu’en instaurant un climat de confiance fondé sur un dialogue franc et des signaux de « gestionnaires moralistes ». La RSE est donc une occasion pour les managers de montrer que l’objectif de l’entreprise n’est pas seulement de faire du profil mais aussi de contribuer à l’atteinte des objectifs de développement durable.

b) Accès préférentiel au marché des capitaux et véritable atout   économique

Avec les exigences actuelles liées à la pratique du développement durable, plusieurs organisations non gouvernementales, syndicats et écologistes pèsent de leur poids pour orienter les financements auprès des entreprises. Ainsi, certains bailleurs de fond n’accepteront financer un projet, une entreprise qu’a la seule condition que les volets environnementaux et sociaux soient explicitement pris en compte. Les entreprises engagées en matière de RSE bénéficieront plus facilement de financements. Ce qui leur permettra de réaliser de bons scores économiques lorsqu’on sait que le problème majeur des entreprises en Afrique reste le financement.
La pratique de la RSE permet aux entreprises de rester en éveil sur la pertinence de la demande sur le marché et donc d’innover. Elle conduit en effet les entreprises à explorer des voies nouvelles pour parvenir à concilier des exigences à première vue contradictoires relevant de registres d’action et de temps différenciés.

c) Outil de gestion des risques

Le fait pour une entreprise de mieux prendre en compte l’impact environnemental, social ou sociétal de ses activités est une manière pour elle de répondre à des pressions déclarées ou anticipées et de prévenir des risques qui peuvent à tout moment compromettre son avenir ou sa rentabilité.
C’est le cas pour une entreprise industrielle qui déverserait dans son entourage des produits nocifs pour l’environnement et pour l’Homme. L’impact sur la rentabilité pourrait en prendre un coup si les consommateurs venaient à bourder les produits. Par ailleurs, les entreprises du fait de la réglementation, feront des dépenses supplémentaires pour rattraper la pollution. Dépenses qui auraient pu être évitées ou réduites en cas de pratique de la RSE.

Si les bénéfices de la RSE sont élogieux, il reste qu’elle nécessite des coûts. A court terme, il serait assez difficile pour les entreprises au Cameroun d’appliquer les mesures sociales de la RSE (Sotamenou et Ndonou, 2012). Il demeure toutefois nécessaire de mettre en place ce formidable outil. La connaissance de la méthodologie à appliquer est assez importante.

3.    Comment s’engager dans la RSE ?

La Responsabilité Sociétale de l’Entreprise s’inscrit dans une nouvelle dynamique de management socio-environnemental. Elle touche tous les démembrements de l’entreprise. L’idéal pour un manager serait de l’intégrer à sa stratégie, à ses modes de fonctionnement et même dans le processus de conception de ses produits.
La mise sur pied des normes (ISO 24000, FLEGT,…) au niveau international, les Organisations Non gouvernementales et syndicats de consommateurs constituent les chemins que pourraient employer les entreprises souhaitant s’engager dans la protection de l’environnement et le respect des normes d’équités sociales. C’est le cas pour les entreprises exportatrices de bois en Afrique qui souscrire au processus FLEGT[2] ou le FSC[3] pour prétendre écouler leur produit sur les marchés européens (l’exemple du Groupe Rougier). Plus proche de nous, l’exemple du poivre de Pendja donc le label est mondialement reconnu, il reste un produit qui ne souffre d’aucune résistance de la part des consommateurs. Ces types de produits sur les marchés sont facilement demandés par les consommateurs qui imposent le respect des conditions de durabilités et d'équités (le travail des enfants, les mauvais traitements des employés, le tribalisme, la destruction de l’écosystème, la destruction de la biodiversité, …).  
Les salariés sont une donnée importante pour le présent et le futur de toutes entreprises. Ces derniers doivent être gérer avec la plus grande délicatesse en telle enseigne qu’elle puisse se sentir partir prenante au processus de développement de la structure. L’inscription à la CNPS[4], les revalorisations salariales, la reconnaissance du mérite, la promotion du sport et l’amélioration du cadre de travail sont autant de mesures sociales qu’un dirigeant peut prendre pour anticiper sur la rentabilité future de sa société à travers l’image qu’il projettera.
Les entreprises ont également le choix d’intervenir dans les activités à caractères sociaux au sein de leur environnement telle la construction des ponts et des routes, l’octroi de bourses scolaires, le reboisement des arbres, le recyclage de ces emballages plastiques, …


Pour approfondir la lecture: 

Isabelle Cadet (2014), « Responsabilité sociale de l’entreprise (RSE), responsabilité éthiques et utopies, les fondements normatifs de la RSE, Etude de la place du droit dans les organisations », Gestion et management, Conservatoire national des arts et metiers - CNAM;

Loubna BARMAKI & Driss AITCHEIKH (2014), « Responsabilité sociétale des entreprises en Afrique: approche comparative (Afrique du Sud, Maroc, Sénégal et Tunisie) », Dossiers de Recherches en Economie et Gestion, N°3; 

Sotamenou Joël et Ndonou Tchoumdop Michèle Estelle (2012), « Pratique de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) par les managers de PME au Cameroun », Rapport de Recherche du FR-CIEA, N° 38/12, Dakar, Décembre ;






[1] Lire le rapport du groupe consultatif de l’Organisation internationale des normes (ISO) sur la RSE, rendu public le 30 avril 2004.
[2] FLEGT : Forest Law Enforcement Governance and Trade
[3] FSC : Forest Stewardship Council
[4] CNPS: Caisse nationale de prévoyance sociale du Cameroun